Le texte ci-dessous est une adaptation d’une lettre que j’ai écrite au Recteur et à la Directrice de l’Université d’Oslo.
Je viens d’apprendre que l’Université organise aujourd’hui un rassemblement pour ceux qui désirent se recueillir à la mémoire des victimes des actes terroristes commis à Paris ce vendredi dernier.
En tant qu’employé de l’Université d’Oslo, de citoyen français et d’athée, je m’offusque que ce rassemblement prenne un caractère religieux.
Je suis tout à fait conscient que la Norvège était, jusqu’à récemment, une monarchie théocratique. Cependant, la France est un pays laïque, avec une séparation très nette entre l’état et le culte, depuis plus d’un siècle. Cette laïcité est fondée sur des principes qui remontent jusqu’à la Révolution. Je cite les articles 2 et 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789:
La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte.
La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.
Ces derniers temps, la Norvège est elle aussi devenue un état laïque. La religion luthérienne a été effacée de la constitution en 2012, et la Norvège jouit de la liberté de religion depuis 1956, date à laquelle l’interdiction d’accès aux Jésuites (euphémisme pour Catholiques) avait finalement été abolie. De plus, le peuple norvégien est l’un des moins religieux au monde, avec un taux d’athées et d’agnostiques proche de 70% selon certaines études.
La liberté de conscience est plus que la liberté de pratiquer la religion de son choix. La liberté de conscience est aussi la liberté de ne pratiquer aucune religion du tout, et de ne pas se faire imposer celle des autres, surtout dans les espaces publiques. Ceci devrait être chose évidente pour une Université publique qui tient la diversité et la liberté de pensée à cœur.
Que ceux qui désirent voir un prêtre, un rabbin, un imam ou autre figure religieuse s’y rendent de leur propre chef. La religion n’a aucune place à un événement organisé par l’Université.
Enfin, je crois bien que l’Université a suffisamment d’employés francophones (et même français) qu’on aurait pu charger d’écrire une version française de cette convocation. Je suis aussi surpris de ne pas avoir trouvé de version norvégienne.